"Les semaines avant le blocus étaient celles de trop..." - Amélie

Fin décembre, Amélie, 18 ans, a répondu à notre appel à témoins. Quelques jours avant la session d’examens de janvier, elle a préféré mettre entre parenthèses ses études débutées à la HEPN. Elle ne supportait plus l’acharnement qu’elle se faisait subir au quotidien.

 

Il n'y avait pas de repères

Amélie est une jeune fille souriante, plutôt bonne élève et la tête remplie de projets. Lorsque le premier confinement se déclarait en mars 2020, elle était en dernière année dans l’enseignement secondaire. À ce moment-là, beaucoup de ses camarades décrochaient des cours. Mais pas elle. Tout en étant jobiste dans une grande surface, elle continuait de suivre les cours, chez elle, et elle décrochait son CESS.

À la rentrée, en septembre 2020, elle s’inscrivait en bachelier Assistant de direction à l’HEPN (la Haute école de la province de Namur). Entre-temps, la courbe des contaminations du COVID-19 diminuait légèrement. Les établissements de l’enseignement supérieur appliquaient dorénavant le « Code orange » et permettaient aux premières années de suivre les cours en présentiel. Cette décision était un soulagement pour la jeune fille.

« En septembre, je ne connaissais personne. Heureusement que j’ai eu quelques cours en présentiel sinon j'aurais été seule dans mon coin. Grâce à un séminaire, on a pu rencontrer d’autres étudiants. J’ai donc pu me créer un petit groupe », expliquait, avec le sourire, la Cinacienne.

 

"On se sentait très seuls."

Amélie - 18 ans

 

Cependant, dès les premiers jours, Amélie et ses camarades de classe se sentaient quelque peu déstabilisés par cette nouvelle vie, faute de repères et de contacts sociaux sur le campus.

« Ma classe et moi-même on aurait aimé avoir des contacts avec les deuxièmes et troisièmes années mais impossible car ils suivaient les cours à distance. On avait juste la classe pour s’entraider. C'est vrai qu'on pouvait contacter les profs et le service social mais on se sentait quand même très seuls."

Depuis novembre 2020, les cours se donnent en ligne. Pour Amélie, suivre ces derniers derrière un écran était un exercice qui lui demandait beaucoup de concentration.

« Tous les jours, je commençais à 8h30 et je ne terminais pas avant 16h. J’essayais de m’aérer un peu la tête mais le soir c’était plus difficile parce que les cours s’enchainaient sans vraiment de pause. En plus des cours, tous les jours il y avait beaucoup de préparation à faire. Toute la journée devant un écran ça faisait très long », expliquait-elle.

 

Tout le temps dans la chambre devant l’écran

Une semaine sur deux, Amélie vit chez son père qui télétravaille dans le salon. De ce fait, elle restait dans sa chambre toute la journée pour ne pas le déranger. Afin de ne plus penser aux cours et à ces quatre murs, cette passionnée de basket se motivait avec les autres étudiants de sa classe : « On avait inclus un programme sportif dans notre planning. On s’appelait à 17h, on travaillait une heure et on prévoyait du sport ensemble. C’est encore de l’écran mais je pouvais décompresser un peu. »

En attendant la reprise des cours de sport et des matchs, cette petite bouffée d’oxygène a permis à Amélie de tisser des liens avec sa classe et de tenir le coup jusqu’à la fin de l’année 2020.

 

« Je coupe le micro et je m’effondre »

D’un naturel sensible, Amélie tentait, tant bien que mal, de gérer la pression durant le premier quadrimestre. Les semaines passaient, la matière s’accumulait et le stress des études allié à celui de la pandémie et de ses restrictions ont fait exploser l’étudiante. Lors d’un de ses cours, elle a craqué.

« Lors d’un dernier cours en décembre, le prof m’a posé une question et je ne l’ai pas comprise. Je n’ai pas pu répondre. J’ai coupé mon micro et je me suis effondrée en larmes. J’en ai parlé à une de mes potes de cours et elle a aussi craqué ».

 

Ce n’est pas facile pour les enseignants

Dans sa classe, Amélie n’était pas la seule étudiante à faillir. Durant le quadrimestre, certains élèves n’ont plus donné signe de vie en cours. D’aucuns ont développé des maladies physiques et psychiques. Selon la jeune fille, cette crise sanitaire fait également souffrir les enseignants : « Lors d’un dernier cours, un de mes profs a pleuré parce que tout le monde était présent en classe. Il avait perdu beaucoup d’élèves dans certaines classes et il disait que, parfois, personne ne réagissait à ses cours. »

 

Arrêt des études

Quelques jours après notre entretien, Amélie nous contactait. Malgré la bienveillance de ses parents et son acharnement pour réussir ses études, elle n’y arrivait plus. Durant le blocus et les fêtes de fin d’année, elle se sentait au plus bas. « J’ai pris la décision d’arrêter les cours et de travailler car je n’étais plus du tout en capacité de continuer », nous écrivait-elle.

 

Cette période particulière fait réfléchir les étudiants. Préserver sa santé mentale au détriment des études est la décision lourde et réfléchie d’Amélie.

Nous lui souhaitons bonne route pour la suite.